A l'occasion du 150° anniversaire de la naissance de saint Jean Marie Vianney, curé d'Ars, patron de tous les curés du monde, le pape Benoît XVI a ouvert une " année sacerdotale ". C'est, pour l'Eglise entière, l'occasion de réfléchir sur le sacerdoce, de prier, de redécouvrir et de renouveler bien des aspects de " l'immense don que sont les prêtres, non seulement pour l'Eglise, mais pour l'humanité elle-même " (*)
Au niveau mondial, le nombre des chrétiens augmente, ainsi que le
nombre des prêtres.
Mais en Occident et particulièrement en
France, pays de tradition chrétienne, nous constatons l'effet inverse !
Le curé d'Ars disait : " Laissez 20 ans une paroisse sans prêtre,
on y adorera les bêtes !
" Combien de nos communes, de nos
villages n'ont plus de prêtres résidents ? Combien de chrétiens
s'éloignent de leur source pour ne garder qu'une religion individuelle,
privée, faite à leur mesure, dans laquelle ils ne renouvellent ni
leur foi ni leur action?... On demande encore à l'Eglise quelques cérémonies
qui concernent des événements familiaux (baptêmes, mariages,
obsèques), mais on participe de moins en moins à la messe du
dimanche et même aux grandes fêtes chrétiennes : Noël, Pâques,
Ascension, Pentecôte, 15 Août, Toussaint
)
Quant à la vie matérielle de l'Eglise, financée en
partie par le " Denier de l'Eglise ", un nombre croissant de chrétiens
s'en estime dispensé
Peu à peu le déclin
s'accentue dans l'indifférence générale, avec des gens
toujours plus exigeants lorsqu'ils ont " besoin " de l'Eglise alors
qu'ils ne participent jamais ni à sa vie quotidienne, ni à sa prière
" Le Fils de l'homme, quand il reviendra, trouvera-t-il encore la
foi sur la terre " avait dit Jésus
D'où cela
vient-il ? Sans doute de plusieurs facteurs. L'Eglise, étant dans le
monde, vit aussi au rythme de ce que le monde vit : les chrétiens sont
dans une société où l'argent et le profit pour quelques
uns dominent la vie économique et sociale de peuples entiers. Les
conditions de vie, la mondialisation, les délocalisations, le chômage
imposent aux familles un stress permanent pour gagner un salaire, avoir un toit,
assurer l'éducation des enfants, leur santé, leur avenir. La vie
familiale est bousculée. Près d'un couple sur deux ne dure pas.
Les familles se " recomposent ". Certaines valeurs universellement
reconnues et respectées pendant des siècles deviennent contestées
et même ridiculisées. On entretient la confusion, l'ambiguïté
en défendant une soi-disant liberté individuelle qui doit tout
laisser faire
Le refus d'un " ordre moral " devient
l'apologie d'un désordre moral généralisé
Tout ceci pour dire que la conscience personnelle et collective est déboussolée
Quel temps reste-t-il pour penser à son âme ?........ " Que
sert à l'homme de gagner l'univers s'il vient à perdre son âme
? et que peut-il donner en échange de sa propre vie ?.... " dit Jésus
dans l'Evangile.
Si les prêtres sont de moins en moins nombreux dans
notre pays, je ne crois pas que ce soit à cause d'un manque de générosité
des jeunes
C'est peut-être parce que les communautés chrétiennes
s'effritent et que " le spirituel " ne pèse pas lourd par
rapport au matériel et à la course effrénée à
la consommation dans laquelle " on " nous pousse à chaque
instant.
Heureusement il y a un " petit Reste ", comme dans la Bible,
comme dans la longue histoire de l'Eglise.
Au milieu de cela, le prêtre
est le signe vivant qu'un " ailleurs " est possible. Sa personne, son être
même, renvoie à l'Invisible et montre une Personne qui est sa
raison d'être, sa joie, sa foi et son avenir. Jésus nous dit : "
Je suis la lumière du monde, celui qui croit en moi ne marche pas dans
les ténèbres. " " Je suis venu pour que les hommes aient
la vie et qu'ils l'aient en abondance. "
L'année sacerdotale peut être l'occasion de découvrir
ou redécouvrir que le prêtre, avec toutes ses fragilités et
ses limites, comme les apôtres, est le témoin d'un Dieu qui est
infiniment présent, qui nous aime et nous appelle sans cesse à réussir
notre vie dans l'amour.
Même si leur vie est parfois difficile et
souvent incomprise, les prêtres vous diront que " ça vaut le
coup " de suivre le Christ aujourd'hui comme hier, et qu'ils sont embarqués
avec tous les hommes de bonne volonté, dans la découverte inépuisable
d'un Amour qui nous renouvelle sans cesse et qui regarde devant.
Le curé
d'Ars disait volontiers : " Le sacerdoce, c'est l'amour du cur de Jésus.
"
Jean-François Arnoux
(*) Benoît XVI : Lettre aux
prêtres à l'occasion de l'année sacerdotale.