Une situation originale, mais pourquoi pas, il en faut bien qui prient pour
ceux « qui n'ont pas le temps » ! Son fils au monastère ?
Qu'est-il allé faire là-bas ? Pourquoi lui ? Quel avenir ? Que
fuit-il ? Que cherche-t-il ? Autant de questions que des parents d'aujourd'hui
peuvent se poser. Et pourtant, les quelques fois où avec son papa nous le
rencontrons, il rayonne, il irradie par toutes les fibres de son corps
Il
est comme transfiguré ! « C'est le seul de mes petits enfants qui
est heureux » a dit une de ses grand mères lorsqu'elle l'a revu. Les
autres de son âge, ceux qui sont mariés ou en couple, ceux qui ont
de jeunes enfants, le sont-ils moins ? Sont-ils gagnés par la sinistrose
de notre monde, par le refus de leur condition humaine : Il faut étudier
vivement que je travaille ; il faut travailler
vivement que je sois en
retraite ; mes enfants sont petits
vivement qu'ils soient grands, etc,
etc.
Ma pauvre dame
Parfois
il m'a été dit : « Ma pauvre dame, c'est terrible ce qui vous
arrive ! », ou encore « C'est une très grande grâce ce
qui vous arrive ! » N'y a-t-il pas un juste milieu ? Il est vrai que, dans
notre monde d'aujourd'hui, je ne peux pas appeler mon fils chaque jour sur un
portable pour savoir ce qu'il fait ; il est vrai que je le vois au maximum trois
jours dans une année ; il est vrai que je ne corresponds avec lui que par
courrier postal, il est vrai qu'il ne reviendra en principe pas à la
maison ; et alors, il y en a d'autres dans le même cas et pour des raisons
bien plus graves que celle-ci ! Chaque jour je rends grâce à Dieu
de son choix de vie, tout comme de celui de ses soeurs qui est tout autre. Je
suis une maman, j'ai donné la vie, je leur ai donné la vie, puis
les moyens de la construire à leur convenance, avec ce qu'ils sont. Ils
sont heureux, il est heureux, là est l'essentiel et quels que soient les
moyens qu'ils ont mis en oeuvre pour y parvenir.
Un mariage à Dieu
Il y a quelques jours, le 14 février dernier, il a fait profession
solennelle, il a prononcé ses voeux définitifs, ses voeux perpétuels
et il a revêtu la coule (vêtement blanc de prière aux manches
très longues) : un mariage à Dieu. Il y a six ans qu'il est là-bas.
Quelque chose de très émouvant, en présence de toute sa
famille, plutôt de ses familles devraisje dire : sa famille de sang, ses
trente frères qui l'accueillent, et la communauté dominicale
habituelle. Il a fait voeu de stabilité, voeu d'obéissance, voeu
de pauvreté et voeu de chasteté. Voeu de stabilité : il a épousé
une communauté, il y sera fidèle et y passera toute sa vie. Voeu
d'obéissance : il suivra les règles de vie de sa communauté,
obéira au Père Abbé comme si c'était le Christ. Voeu
de pauvreté : il n'a pas d'argent, pas de propriété privée,
pas de bien personnel, rien, il a tout laissé à la porte du monastère.
Voeu de chasteté : il vit avec ses frères, et avec les hommes dans
le respect de ce que chacun est.
Une maman qui partage sa joie de voir ses enfants heureux, Maryse, maman de
frère Sébastien-Marie Rodot, moine trappiste.